En rentrant de vacances, j’ai lu, dans un Courrier picard datant de juillet, un article sur l’inquiétant assèchement de trois rivières de la Somme dont la Maye, petit fleuve côtier picard.
L’écrivain Jacques Darras suit depuis près de quatre-vingt ans le cours de cette eau natale pour nous décrire son monde et le notre. Depuis toujours l’eau est son encre pour une œuvre poétique joyeuse, vivifiante et aussi prophétique. ”Je suis une rivière” n’est pas seulement un livre de plus d’une création foisonnante. L’auteur descend la rivière par l’écrit mais aussi pour la première fois par la peinture; des gouaches éclatantes proches du fauvisme, peut-être comme un dernier feu de couleurs pour une eau qui disparait de nos paysages. Modeste ruisseau, il faut le chercher ce fleuve qui passe par Crécy et Rue pour rejoindre la baie de Somme et le monde. Notre confort l’a recouvert de pont, canalisé de tuyaux, vampirisé pour l’arrosage productif.
Mais la Maye résiste, elle ne se résout pas à l’assèchement de l’oubli, elle sait qu’elle peut compter sur la poésie. Jacques Darras, comme tout poète, est prophète en son pays.Notre région est striée de fleuves côtiers fragiles qui façonnent nos vallées. Et ce n’est peut-être pas que le hasard si la librairie du Labyrinthe a édité ce beau livre deux mois avant que cet été, la Maye ne s’épuise pour la première fois de mémoire d’homme. Cette fois, in extremis, une pluie salvatrice l’aura sauvée de l’évaporation. La poésie de Jacques Darras aussi…https://www.librairiedulabyrinthe.fr/…/je-suis-une…/
Philippe